jeudi 29 novembre 2012

GOOD COVER VERSION II


Un peu de rab' pour un vaste sujet... Commençons par des reprises qui n'en sont pas vraiment, les adaptations françaises de standards américains. Le résultat de ce petit exercice si cher aux yéyés est souvent assez traumatisant. Cependant, il existe quelques belles choses qui n'ont pas à rougir de leurs homologues anglo-saxonnes. Le premier exemple qui me vient à l'esprit est "Salut les amoureux" de Joe Dassin, une adaptation de "City Of New Orleans", un classique de la musique country. Et dieu sait que Dassin l'aimait la musique country. Mais là où cette adaptation est brillante, c'est qu'elle s'éloigne du sujet d'origine, une chanson sur le voyage, pour devenir une chanson d'amour. Rien d'original dit comme ça, Joe Dassin étant un chanteur de charme. Mais le texte est sublime, vraiment bien écrit; de la variété de qualité en somme. Tout le contraire du récent "Cabrel assassine Dylan", là c'est le degré zéro de la musique, honteux! Les textes sont ridicules, le vocabulaire Dylanien étant bien particulier, il aurait fallu une sacrée dose de talent pour l'adapter à la langue de Molière. Francis Cabrel ne l'a visiblement pas, quand "Baby Blue" devient "Bébé Bleu", y a comme un problème, non? Ça ne sonne pas! Je n'étais déjà absolument pas fan des adaptations d'Hugues Aufray, mais à côté, c'est du génie! Le pire, c'est que je n'ai rien contre Cabrel, "Samedi soir sur le terre" est même un très bon disque.

Pour en finir avec la France, deux petits exemples de reprises réussies, mais chantées en anglais cette fois. La première, "Cirrus Minor" par Etienne Daho. Il fallait oser s'attaquer à ce vieux titre méconnu du Floyd. Au final, c'est merveilleux, d'une douceur inouïe, classe comme de la pop anglaise tout en gardant le côté psychédélique de l'oeuvre de base. C'est tellement beau que l'on pardonne volontiers l'accent frenchy du chanteur. Deuxième exemple, et non des moindres, "Polk Salad Annie" par Joe Dassin (encore lui!). Une tuerie! Même si elle est très proche de l'originale, le résultat reste surprenant, presque aussi bon que du Tony Joe White. Certaines versions live d'Elvis Presley ne lui arrivent pas à la cheville, c'est dire.

Certaines chansons ont été reprises tant de fois, qu'il est difficile de savoir quelles furent leur versions d'origine. Pour beaucoup, "I Heard It Through The Grapevine" est de Marvin Gaye, mais c'est faux. A la base, ce morceau écrit par Norman Whitfield et Barrett Strong fut enregistré par Smokey Robinson & The Miracles en 1966, mais c'est la version de Marvin parue deux ans plus tard qui passera à la postérité. Ma préférence va aux Creedence Clearwater Revival qui en livreront une interprétation démoniaque de onze minutes sur leur fabuleux "Cosmos Factory", ce qui nous laisse largement le temps de décoller... Des reprises plus célèbres que les originaux, ce n'est pas ce qui manque. Si je vous dis "Dirty Old Town", vous pensez tout de suite aux Pogues et non pas à Ewan MacColl. Pareil pour "Without You", ce n'est pas Mariah Carey, non non, c'est Badfinger, un groupe un peu oublié aujourd'hui. Et ce malgré de bonnes chansons et des producteurs célèbres, les Beatles.

Finissons par quelques petites covers bien sympas, sans thèmes particuliers. Avez-vous déjà entendu la version slide de "Ace Of Spades" de Motörhead par Bjorn Berge, c'est du pur délire. Ce mec tout seul fait du boucan pour dix, une telle énergie c'est proprement inhumain. Sur la version "deluxe" de l'album "Sound Affects" des Jam, il y a une démo hallucinante de "Waterloo Sunset", ce chef-d'oeuvre des Kinks, qui à elle seule justifie l'achat de cette version augmentée. Dans le genre folie furieuse, n'oublions pas l’inénarrable lecture qu'a fait Rachid Taha de "Rock The Casbah" du Clash. Malgré ma passion pour le groupe de Joe Strummer, je trouve la reprise largement supérieure.

C'est tout pour aujourd'hui, même si ce sujet est sacrément inspirant...

mardi 27 novembre 2012

GOOD COVER VERSION


Aujourd'hui nous allons aborder un sujet souvent méprisé ou moqué, l'art (car s'en est un) de la reprise. Pour beaucoup de monde (ne connaissant pas grand chose à la musique), faire une reprise est le dramatique aveu d'une perte d'inspiration ou simplement d'une fainéantise aiguë! Certes, les reprises commerciales que nous balance la télé-poubelle abondent dans ce sens, mais ce genre de productions ne mérite aucune considération, ne nous y attardons pas. Parlons plutôt de reprises pleines d'âmes, surprenantes ou audacieuses, voire meilleures que les originaux (c'est plus rare), celles qui portent l'hommage au rang d'art majeur! Je ne vais pas dresser une liste exhaustive, le travail serait titanesque et mériterait sans problème un blog dédié, mais juste évoquer quelques belles choses qui m'ont marquées.

Commençons par un sommet du genre, "With A Little Help From My Friends" par Joe Cocker, ou comment sublimer un morceau plutôt faible d'un grand groupe. Ici, tout est parfait, chant habité, choeurs Gospel, un orgue beau à pleurer et surtout la guitare de Jimmy Page, frisson garanti. A côté la joyeuse petite chansonnette des Beatles fait peine à entendre. Pour "All Along The Watchtower", c'est un peu la même chose, l'original a beau être sublime, c'est la version de Jimi Hendrix qui passera à la postérité, c'est ainsi! Certains artistes se sont fait une spécialité de la reprise qui tue, l'exemple qui me vient en premier à l'esprit c'est Johnny Cash et sa série des "American Recording". Comment ne pas pleurer en écoutant SA version de "Hurt", Johnny Cash ne reprend pas la chanson, il la fait sienne, c'est là toute la différence. De même que sa déchirante adaptation de "Redemption Song" de Bob Marley, chantée en duo avec le regretté Joe Strummer. Pour le coup, je serai bien incapable de choisir entre les deux, malgré l'aura entourant l'originale. Plus récemment Tom Jones a bluffé son monde avec "Spirit In The Room", son sublime dernier album. Celui-ci débute avec une relecture incroyable de "Tower Of Song", une chanson assez méconnue de Leonard Cohen. Encore une fois, la reprise enterre l'oeuvre de base. Et puis, tant que nous sommes chez mister Cohen, impossible de ne pas évoquer le cas "Hallelujah" par Jeff Buckley, tout le monde connait la reprise sans savoir que s'en est une. Maintenant on fait même des covers de la cover, etc.... dans quel monde vit-on?

Une reprise n'a d'intérêt que si elle diffère assez de l'originale, un bête copier-coller n'a aucun sens. Ceci est d'autant plus vrai dans le cas d'une reprise contemporaine à l'originale. Quand Otis Redding sort son "Satisfaction" quasiment en même temps que les Stones, certains auront des doutes quant à la paternité du titre. Faut dire que Otis maîtrise la chose d'une manière incroyable, il transforme le rock Stonien en grosse dynamite Soul! Le moins que l'on puisse dire, c'est que les Stones ne rendront pas la pareille en reprenant "I've Been Loving You Too Long"...

L'idéal pour qu'une reprise fonctionne, c'est qu'elle soit surprenante. Ainsi, personne ne pouvait prévoir que les Foo Fighters allaient reprendre "Baker Street" de Gerry Rafferty. Et pourtant le résultat est heureux, quel plaisir d'entendre rugir une guitare en lieu et place du Saxophone. Un pari osé, mais gagné haut la main. Autre délire un peu fou, reprendre du Kraftwerk! C'est d'autant plus bizarre quand c'est un groupe Klezmer qui s'y colle. La version rock-rap-klezmer de "Die Roboter" par Rotfront feat. L.Soybelman est une merveille. Une incontestable réussite, pas seulement un exercice de style.

Je vais m'arrêter ici pour aujourd'hui, mais j'aborderai à nouveau le sujet quand l'envie me reprendra.

Ps: La photo est une cover de couverture (!), celui qui trouve "koicé" gagnera ma reconnaissance mensuelle (l'éternité c'est trop long), alors tous à vos comm'!

vendredi 23 novembre 2012

N°82 THE SPECIALS - More Specials - 1980


Les Specials, c'est cette bête animée par une grosse envie d'en découdre. Un groupe politisé, ne serait-ce que par sa composition mixte, noire et blanche. Un bon coup de pied au cul du National Front. Jerry Dammers et Terry Hall sont les deux compositeurs principaux du groupe, mais celui-ci reste très collectif, une utopie. Dammers va également créer un label (2 Tone Records) pour publier les disques des Specials, mais aussi ceux de Madness et des Selecter, soit la crème du ska Briton de l'époque. Le premier L.P. du groupe sera produit par Elvis Costello, c'est une oeuvre gigantesque, mais finale. Tout est dit, en un seul disque, c'est l'étendard du ska anglais. Impossible à reproduire, insurpassable. C'est typiquement le genre de premier album qui offre une super carte de visite, mais qui se révèle vite handicapant pour la suite. On parle souvent du "difficile second album", "More Specials" en est l'exemple parfait, c'est l'un des seconds albums les plus audacieux de tous les temps! Il est préférable d'écouter "More Specials" en vinyle pour en saisir tout le concept. Une face A dans l'esprit ska du premier disque et une face B qui part dans tous les sens. World music, electro ou encore easy-listening, bref un bon gros melting-pot bien barré!

L'album démarre très fort avec une version speedée de "Enjoy Yourself", on retrouve ce qui faisait le charme du premier album, peut-être un poil plus produit. Suivi de près par l'apocalyptique "Man At C&A", le cousin dub de "London Calling". Le groupe excelle toujours dans l'art de nous pondre des reggaes d'une absolue coolitude, "Do Nothing" sonne sévèrement bien, ça joue! Ecoutez-moi cette petite envolée de cuivre décontractée du slip... "Pearl's Café" est la géniale fusion entre une sorte de reggae caribéen et la pop "So British" des Kinks. La face A se termine sur un double hommage à James Brown et James Bond, un truc bien furieux! Nous voici arrivé à mi-parcours, finie la promenade de santé, c'est ici que les choses vont prendre une tournure plus qu'étrange. "Stereotype/Stereotypes Pt.2" démarre façon mariachi quasi-robotique avant de virer dub dans une seconde partie simplement hallucinante, d'une modernité sidérante. Damon Albarn saura s'en souvenir lors de la création de Gorillaz. On progresse encore d'un pas vers la quatrième dimension avec "Holiday Fortnight", un titre world un rien rococo, dépaysement assuré! "International Jet Set" préfigure ni plus ni moins que la french touch de Air. Dammers est un garçon malin, capable d'amener son groupe sur des terrains inattendus, l'apogée sera le magnifique "Ghost Town" qui paraîtra en single l'année suivante. "Enjoy Yourself (reprise)" referme la face B et par la même occasion l'album, l'ambiance n'est plus à la fête, le groupe explosera peu après. Jerry Dammers sortia en 1984 "In The Studio" sous le nom de Specials A.K.A, mais peut-on encore considérer cela comme un disque des Specials?

mercredi 21 novembre 2012

BREAKBOT - By Your Side


"Don't Believe The Hype" est habituellement mon adage, mais parfois une exception vient confirmer la règle. Exception toute relative, dans la mesure où la hype n'est pas si grande que ça, finalement... La musique de Breakbot est un savant mélange de Sebastien Tellier et Michael Jackson, le barbu pour le look, et le défunt roi de la pop pour la musique (l'inverse serait plus fâcheux, encore que j'ai tendance à préférer la musique de Tellier, cette longue remarque n'a donc aucun sens). En fait c'est surtout le titre "Why" qui nous amène vers ce que faisait Jackson période "Bad", la voix de Ruckazoid n'est pas étrangère à ce phénomène. Tout ça pour dire que le morceau est grandiose, délicieusement 80's, alors même que la musique populaire de cette décennie était horrible. Le single "Baby I'm Tours" feat Ifrane, a été utilisé dans une pub ou une émission t.v, mais je ne sais plus pourquoi, de toute manière cela n'a pas la moindre importance. Encore une fois, la chanson est diablement efficace, et ceci est valable pour la quasi-totalité de l'album. Les titres aux tempos moins élevés sont tout aussi bons, "One Out Of Two" possède une sonorité génialement kitsch qui vous propulsera directement vers un monde alternatif bloqué dans les années 80. Même le solo de guitare semble millésimé! Quelques instrumentaux disco-chics viennent ici et là donner du volume au disque, on peut lorgner vers le dancefloor tout en restant distingué!

J'ai failli oublier de vous dire que ce nouveau prodige barbu est français et qu'il est produit par Ed Banger, le label créé par Pedro Winter, découvreur entre autres de Justice. Les plus gourmands apprécieront également la superbe pochette qui rend un vibrant hommage au chocolat Milka.

mardi 20 novembre 2012

N°81 THE WARLOCKS - The Mirror Explodes - 2009


Il arrive parfois qu'un groupe change radicalement de style au cours de sa carrière, c'est exactement ce qu'ont fait les Warlocks. Ce gros changement est survenu, comme souvent, lors d'un bouleversement conséquent dans le line-up. Auparavant les Warlocks étaient d'honorables seconds couteaux issus de la scène "revival" du début des glorieuses années 2000. Des outsiders hautement plus recommandables que les très surfaits New-Yorkais des Strokes. Car plus psyché, plus heavy et avec une petite particularité: deux batteurs! Leur démentiel deuxième album, "Phoenix", a d'ailleurs connu un joli petit succès, grâce en partie au single "Hurricane Heart Attack". Un magma psychédélique de très haute tenue. Mais vers le milieu de la décennie, ce fut la débandade, le groupe explosa plus ou moins, avant de renaître de ses cendres, mais sous une autre forme, resserrée autour de son leader Bobby Hecksher. Exit le gros son typé 70's, place à la noirceur Noisy. Le premier disque des Warlocks 2.0 sera "Heavy Deavy Skull Lover", un monolithe noir, une oeuvre abyssale, toujours à la frontière du Post-rock. Cet album délabré désappointera bon nombre de fans, mais force est de constater qu'avec ce dernier, les Warlocks passent dans une toute autre dimension. La chose est grandiose, elle vous happe vers la nuit tel le Kraken vers le fond de l'océan. Ce qui nous amène enfin à "The Mirror Explodes", dans la même veine que son illustre aîné, mais nettement plus accessible et mieux produit, bien qu'un peu moins dense.

"Red Camera", obsession psyché noir, jumeau glauque d'une composition des Black Angels. Une ouverture oppressante, qui fera déjà le tri parmi les auditeurs, on n'est pas là pour se marrer, c'est sûr. Et ce n'est pas "The Midnight Sun" qui amènera de la légèreté, car le groupe prend un malin plaisir à alourdir toujours plus l'ambiance. Après un début de chanson laissant entrevoir un peu de lumière, les choses s'assombrissent rapidement sous une tempête de guitares saturées. Le rythme quasi méditatif de "Slowly Disappearing" nous ferait presque planer sans substances, alors avec, c'est le (bad) trip assuré... Enfin un peu de douceur, si je puis dire, avec "There Is A Formula To Your Dispair", un morceau d'une beauté miraculeuse. Tout en retenue, d'une telle simplicité mais d'une intensité folle! Pour tout dire, c'est l'une de mes chansons préférées. Placé juste après, "Standing Between The Lovers Of Hell" c'est l'opposé, tout en muscles; allant crescendo jusqu'à l'apocalypse finale, du grand art!  "You Make Me Wait" nous replonge dans un climat psychédélique assez chargé et sombre, mais paradoxalement plutôt léger. Comme quoi, il n'est pas impossible de faire voler un Zeppelin de plomb. L'instrumental "Frequency Meltdown" renvoie directement aux grandes heures de Neu!, le même aspect répétitif doublé d'une absence totale de compromis. L’album finit sa course folle avec un dernier titre plus paisible et lumineux, "Static Eyes" ou comment finir sur un coup de génie!

Globalement, la deuxième monture des Warlocks n'a pas eu de critiques franchement positives, ce qui est simplement hallucinant (ou une preuve de mauvais goût)!

vendredi 16 novembre 2012

N°80 BRIAN SETZER - Nitro Burnin' Funny Daddy - 2003


Le chat de gouttière en chef est un homme très productif. Entre les reformations  scéniques des Stray Cats, ses albums solo et ceux avec son Big Band, il y a de quoi faire. Si on ajoute à cela la tripotée de lives (son domaine de prédilection), il faudra être sacrément doué en (After)mathématiques pour tenir les comptes. La discographie de Brian Setzer est donc plus que conséquente, et d'une qualité franchement bonne dans l’ensemble. Mais s'il ne devait en rester qu'un, ce serait "Nitro Burnin' Funny Daddy", déjà le blase du disque me plait bien... L'homme à la Gretsch nous livre ici son album le mieux produit et le plus varié, blues, Rockhab' ou encore Doo-Wop, tout y passe et avec brio.

"On a que soixante ans sur la planète, alors autant en profiter"... Voilà en substance ce que nous raconte le morceau d'ouverture, le tonitruant "Sixty Years". D'entrée de jeu, ça cogne comme rarement, la batterie tabasse, la contre-basse claque et la Gretsch crache tripes et boyaux. La production est au top, le groupe semble jouer live dans votre salon, incroyable! "Don't Trust A Woman (In A Black Cadillac)" est plus hard rock, nul doute que la fameuse Cadillac noire carbure à la Nitro! On a tendance à oublier que Brian Setzer est aussi capable de douceur, et quand celui-ci se lance dans la ballade-soul, ça donne "That Someone Just Ain't You"; une merveille. Plus loin, un "Ring, Ring, Ring" totalement Rock' n' Roll ajoutera encore de l'huile sur un feu qui avait pourtant déjà bien pris. High Voltage Rock And Roll!!!! Suivi de près par l'hilarant "Drink Whiskey And Shut Up", un Rockhab' qui doit bien titrer 40°! Après plusieurs rasades de ce tord-boyaux fait maison, pas étonnant de finir dans le désert pourchassé par les coyotes, convoité par les vautours et menacé par un rattlesnake! "Wild Wind" soulève des nuées de sable rouge; idéal pour un duel au soleil. Une dernière pépite pour la route, "To Be Loved" n'est pas simplement un joli doo-wop, c'est une véritable machine à remonter le temps. Direct dans les 50's! J'allais oublier de vous causer de "Smokin' N' Burnin'", le morceau le plus incendiaire du skeud, un rock si véloce qu'il frise la démence; Setzer est au sommet de son art et enchaîne les solos qui tuent!

Alors "Nitro Burnin' Funny Daddy", meilleur qu'un album des légendaires Stray Cats? Putain que oui!

lundi 12 novembre 2012

THE TING TINGS - Sounds From Nowheresville


Certes cette chronique arrive avec quelques mois de retard, l'album étant sorti à la fin du mois de février. Du coup mon libellé "Actu ou presque" n'a jamais été aussi vrai. Pour tout dire, j'avais entendu trop de critiques négatives sur ce disque, alors j'ai passé mon chemin sans trop chercher à comprendre. Mais voilà que le hasard l'a remis sur ma route au détour du bac à soldes (déjà!). J'avais beaucoup aimé le premier opus du groupe "We Started Nothing", paru en 2008. Un album de dancefloor, mais classe; un peu comme si les Kills avaient viré disco! Maintenant, toute la question reste de savoir si les Ting Tings se sont vraiment vautrés avec ce "Sounds From Nowheresville".

D'entrée ça cogne, "Silence" porte assez mal son nom, c'est de l'electro-pop plutôt bruyante. Un bon morceau d'introduction en somme. Le deuxième titre, "Hit Me Down Sonny" laisse plus dubitatif. C'est certes efficace, plutôt bien foutu, mais le refrain a un arrière goût de soupe R'n'B, qui vient franchement gâcher la fête. Heureusement que "Hang It Up" débarque pour sauver l'affaire. Putain, on dirait les Beastie Boys de "Check Your Head", mazette quelle tuerie! L’enchaînement avec le très rock "Give It Back" frise la perfection. Encore un titre redoutable! "Guggenheim" convoque à nouveau les spectres des sales gosses de Brooklyn. Les Ting Tings ne sont jamais aussi brillants que lorsqu'ils pillent les BBoys! "Soul Killing" et son ska dansant fait penser à Santigold, encore une fois ce n'est pas très inventif, mais il y a pire comme référence! Après un très dispensable "One By One", le groupe prend le risque de clore l'album avec trois ballades. Un choix audacieux mais payant, le duo négocie habillement ce virage dangereux. Le cotonneux "In Your Life" nous conduit vers la sortie tout en douceur; merci pour cette charmante intention.

Si "Sounds From Nowheresville" est plus ouvertement commercial que son prédécesseur, il est aussi un cran en-dessous. Un petit disque sympathique, mais qui ne va pas au-delà!

jeudi 8 novembre 2012

N°79 THE MONKEES - The Monkees - 1966


L'affaire est entendue, les Monkees sont un gros coup commercial, la réponse américaine préfabriquée à la déferlante Beatles. Les membres du groupe ont été recrutés via une petite annonce par les producteurs Bob Rafelson et Bert Schneider. L'idée c'est de faire "Hard Day's Night" en série télé! Et pour tout dire le résultat n'est pas meilleur ou pire que le film de Richard Lester avec les Fab Four. Mais attention, les quatre jeunes gens des Monkees ne sont pas des bleus non plus, chacun possède déjà sa petite expérience dans le métier. Ils sont aussi pour la plupart des musiciens accomplis, bien qu'ils se contenteront du chant sur les premiers albums. C'est Ed Kirchner qui gérera le "Pôle-musique", avec des chansons écrites sur-mesure, jouées par la crème des musiciens professionnels d'alors. Une méthode qui annonce des décennies de musique insipide et préfabriquée, à une différence près, celle proposée ici est exceptionnelle. Au risque de faire grincer quelques dents, j’affirme que cela vaut bien du Small Faces ou du Yardbirds! Très vite, les quatre garçons tout autant dans le vent opéreront une véritable mutinerie. Ils veulent le contrôle total de la musique, cela aboutira à la mise au placard du producteur Ed Kirchner, mais surtout à l'album "Headquarters". Et aussi fatalement à l'explosion du groupe à l'orée des cérébrales 70's.

L'album démarre avec le générique du feuilleton, évidemment. C'est un morceau pop forcément marqué du sceau des Beatles, mais cela reste joliment exécuté. Les choses sérieuses débutent avec "Saturday's Child", du Easybeat pur jus, la suite logique de "Friday On My Mind". Mais le tube c'est "The Last Train To Clarksville", de la pop haut de gamme, un truc vraiment énorme. Le genre de titre indémodable, combien de jeunes groupes vendraient leurs mères pour qu'on leur écrive une chanson de ce calibre? "Let's Dance On", c'est du proto-punk digne d'une compilation "Nuggets", d'une violence inouïe pour l'époque. La batterie cavale à cent à l'heure et la guitare rachitique et saccadée annonce ni plus ni moins Richard Hell. Mais pour plaire au filles, il faut une ballade et "I Wanna Be Free" tient son rôle à merveille, tous les ingrédients sont présents et dans les bonnes proportions.

Ce premier album des Monkees contient douze vignettes en forme de photographies d'une époque révolue; et malgré son côté mercantile, il demeure un indispensable.


mercredi 7 novembre 2012

NEIL YOUNG & CRAZY HORSE - Psychedelic Pill


"Premier rapport après ingestion de la pilule psychédélique du bon Dr Young".

C'est peu dire que l'homme reste productif, un disque de reprise en juin et un nouvel album de compositions inédites en octobre, le tout avec le Crazy Horse. De quoi affoler le fan! Certes "Americana" était sympathique, mais pas de quoi casser trois pattes... bref! Reste à espérer que le Loner sorte enfin l’artillerie lourde et qu'il fasse cravacher son Crazy Horse...

Lentement, le cheval engourdi sort de son box. Remisé depuis trop longtemps, épris de liberté. Les membres lourds, celui-ci s'élance au travers de la plaine infinie. De plus en plus rapide, de plus en plus fou. Ce vieux cheval fatigué redevient un pur-sang, un mustang indomptable, sauvage! Voilà ce qu'est "Driftin' Back", la folle cavale du Crazy Horse qui s’étend sur près d'une demi-heure. Ça commence folk puis très vite ça vire électrique, la rythmique est fiévreuse et les guitares sont plus lourdes que jamais. Faut-il être à la fois fou et salement talentueux pour pondre un tel machin en début de galette?  Juste après, "Psychedelic Pill" incite fortement à la consommation d'acides. Mais cette chanson n'est qu'une trêve, car ce qui suit est démentiel. "Ramada Inn" est une merveille, assurément l'un des tous meilleurs titres de Neil Young; oui Monsieur, parfaitement! Une invitation au voyage à la fois solaire et mélancolique. Le Crazy Horse est en totale liberté, laissant la mélodie se déployer d'elle-même, à son rythme. "Born In Ontario" sonne la fin du premier acte, c'est folk et craspouille, forcément sympa!

Les vieux amis, les souvenirs, la musique, tout ça se mélange. La nostalgie, forcément. "Twisted Road" convoque Dylan, Hank Williams et le Dead, c'est un morceau hommage; très dans l'ère du temps. Débarque ensuite l'étrangement pop "She's Always Dancing". Au départ rien ne semble s'imbriquer, puis à partir du deuxième couplet tout devient limpide; évident. Ce n'est certes pas le meilleur titre de l'album, mais il se défend bien. "For The Love Of Man" est un doux Gospel qui relâche enfin un peu la tension. C'est joliment troussé, avec de très beaux choeurs et une mélodie à toutes épreuves. Mais pour terminer en apothéose, le vieux Neil et sa bande se fendent d'un "Walk Like A Giant" juste démentiel. Les guitares sont rauques et la rythmique est d'une lourdeur à faire pâlir bon nombre de groupes de métal... Les géants arrivent et ils vont tout raser, pour mieux reconstruire évidemment.

"Psychedelic Pill" est un album sans concessions, hors formats, hors normes, gigantesque. C'est le disque que je n'attendais plus de la part de Neil Young. Son meilleur depuis "Ragged Glory"... je dirais même qu'il le dépasse d'une tête.

samedi 3 novembre 2012

N°78 VIC CHESNUTT- North Star Deserter - 2007


Vic Chesnutt, c'était de l'émotion pure, autant faite de chair que d'acier. De la musique si chargée que son écoute peut se révéler fatale, un tel tourbillon de sentiments ne doit pas être pris à la légère. Vic Chesnutt personnifie à lui seul la face sombre du système américain, l'un des plus moisis du monde. Pas d'accès au soin, rien, nada! Être artiste et handicapé demande une vraie dose de courage dans un pays où la sécurité sociale est quasiment inexistante. Mais voilà, le courage nous lâche tous un jour, pour Vic Chesnutt, ce sera un sordide matin de Noël. Suicidé. Laissant derrière lui une oeuvre imposante et séminale.

"North Star Deserter" a beau être paru durant l'été 2007, il est froid comme l'acier, froid et brûlant comme le verglas. Ce disque fut distribué par les canadiens de chez Constellation, un label bien connu des amateurs de post-rock. Pour cet album, Vic Chesnutt s'est également offert les services d'un backing band de luxe, puisque ce n'est ni plus ni moins que le Silver Mt Zion, l'une des nombreuses têtes de l'hydre Godspeed You! Black Emperor. Dès les premiers accords de "Warm", l'ambiance s'installe, l'aigrelette guitare danse dans la poussière avec cette voix qui vacille comme la flamme d'une bougie malmenée par un courant d'air. Derrière, l'orchestre tient son rôle avec sobriété et discrétion, agissant par touches éparses, comme un peintre économe. "Glossolalia" est semblable au dernier envol de l'oiseau, gracile et beau, qui l'instant d'après retombe comme une pierre, si lourde qu'elle creuse le sol. Et la chorale chante. Noirceur encore, "Everything I Say" est rude, violente, tendue à l'extrême; toujours au bord de la rupture. Et l'orchestre joue, il joue avec nos nerfs, nous malmène. Parfois, l’espoir renaît le temps d'un instant; le temps d'un rapport protégé. Mais la mélancolie, cette implacable maîtresse, nous retrouve inlassablement  Et la chorale chante comme une seule voix, elle me dit que je ne serai jamais seul ("You Are Never Alone"), mais ce n'est pas vrai. Elle-même n'y croit pas! Déjà les ténèbres nous renvoient à notre solitude. Mais toujours cette musique qui nous guide, belle parfois, comme les rayons éblouissants du soleil. "Splendid" nous porte à bout de bras, dieu, que ce voyage est épuisant. "Ce n'est pas fini, tant que ce n'est pas fini", nous chante le barde malade. Bien sûr que si, c'est couru d'avance! Tout finira dans un dernier tremblement...

Ce disque me transporte à chaque fois, c'est un plaisir fin. Un de ceux que je m'offre rarement. Il ne faudrait pas casser la magie, ce serait trop con. "North Star Deserter" n'est pas à mettre entre toutes les mains, il est trop dangereux, sa beauté est un poison.

jeudi 1 novembre 2012

N°77 T.REX - Electric Warrior - 1971


Il y a parfois de grands disques ou artistes qu'on met énormément de temps à aborder. Simplement  car la légende est trop imposante, trop encombrante voire même polluante, comme c'est le cas pour Hendrix ou les Doors par exemple. Mais pour d'autres, c'est juste une affaire de bon moment, il faut attendre pour jouir pleinement de la découverte. Ainsi, arrive enfin l'heure de ma rencontre tardive avec le monolithe noir de T.Rex, découvert dans son entièreté qu'à l'occasion de sa récente réédition. Bien sûr, j'avais déjà entendu "Get It On", impossible de passer à côté de cet énorme tube; ou encore entrevu la pochette, sublime, sorte de quintessence de l'artwork rock, mais le disque dans son intégralité, non! Et très franchement, je ne regrette aucunement ce temps perdu, car les découvertes qui vous vrillent l'épiderme sont plutôt rares, et quand elles passent par là, autant en profiter, et tant pis si c'est avec un truc vieux de quarante ans! Bien sûr, il y a filiation avec le Bowie débutant, "Electric Warrior" est un peu le cousin viscéral de "Ziggy Stardust", il ne vient certes pas de Mars, mais c'est de l’électricité qui court dans ses veines.

Départ stratosphérique vers un autre monde avec "Mambo Sun", et déjà les jeux sont faits. Ce sera grand! Le son est sans fioritures, très roots, mais dans le même temps très classe, c'est bien de glam-rock dont on cause! Le duo Bolan/Visconti accouche d'un pur moment de grâce, moment qui perdure tout au long de l'album. "Cosmic Dancer", "Jeepster" ou "Monolith", tout ça est tellement évident, simple et beau. S'en est presque désarmant. "Lean Woman Bleus" est boueux mais classe, ancien et nouveau; il reste encore aujourd'hui un très bon exemple de ce que doit être le blues de l'an 2000. Débarque ensuite "Get It On", dont il n'y a finalement pas grand chose à dire, c'est parfait, tubesque, archi-connue, mais ça fait toujours son petit effet! Le disque alterne morceaux enlevés et ballades magnifiques dont le sommet est atteint avec la bouillonnante "Life's A Gas". Encore une fois la simplicité est de rigueur, avec juste ce qu'il faut pour transformer une simple chanson en merveille indémodable. "Electric Warrior" est un disque qui vous aspirera dans la nuit... comme l'elfe Marc Bolan envolé trop tôt...

Evidemment le son de la réédition est parfait, les bonus sont toujours très utiles et le packaging vaut le coup. Comme toujours avec la série "Deluxe Edition", un label de qualité!